On se souvient de cette belle photo vantant les mérites de la Bretagne : au milieu des flots, une île … sur laquelle était construite une maison, propriété d’une SCI. Celle-ci invoquait son droit à l’image pour s’opposer à la diffusion de la photographie. Alors que sa demande avait été accueillie par la Cour d’appel, la décision est cassée :
« Vu l’article 544 du Code Civil ;
Attendu que le Comité régional de tourisme de Bretagne (le CRT) a utilisé à des fins de publicité un cliché dont il avait acquis le droit de reproduction de M. P., photographe professionnel ; que cette image représente l’estuaire du Trieux, avec, au premier plan, l’îlot de Roch Arhon, propriété de la société civile immobilière du même nom, et a été diffusée malgré l’opposition de celle-ci ;
Attendu que pour accueillir la demande de la SCI en interdiction de cette reproduction, l’arrêt attaqué énonce que les droits invoqués par le CRT et M. P. trouvent leurs limites dans la protection du droit de propriété de la SCI, à la mesure des abus inhérents à l’exploitation d’une représentation de son bien à des fins commerciales et avec une publicité importante, que l’île est le sujet essentiel de l’image, et que la photographie est utilisée sous la forme d’une affiche à grande diffusion, au titre d’une campagne publicitaire destinée à la promotion du tourisme ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi l’exploitation de la photographie par les titulaires du droit incorporel de son auteur portait un trouble certain au droit d’usage ou de jouissance du propriétaire, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
…/…
Note :
Pour s’opposer à la publication de l’image d’un immeuble, le propriétaire peut utiliser deux arguments. Le premier est celui de la protection de sa vie privée (art. 9 du Code Civil). Le deuxième, comme dans l’affaire commentée, est l’article 544 qui définit le droit de propriété.
Mais dans les deux cas, le propriétaire qui estime que son droit n’est pas respecté doit établir la preuve de son préjudice.
En l’espèce, cette preuve n’était pas rapportée. Dans une affaire jugée en 1988, la Cour de Cassation avait cassé un arrêt (Civ. 2è, 29 juin 1988). Au motif que la Cour d’appel qui estime que la publication d’une photo d’une résidence portait atteinte à la vie privée du propriétaire devait préciser en quoi la publication révélait des faits ayant le caractère d’intimité prévu à l’article 9 du Code Civil. La preuve n’était donc pas rapportée non plus.