CASS. CIV. 1è, 19 février 2002

Il résulte des articles 6 de la loi du 2 janvier 1970, 72 et 86 du décret du 20 juillet 1972 que l’agent immobilier doit conserver un original de la convention pendant dix ans. En conséquence, par dérogation à l’article 2004 du Code Civil, il ne peut, pendant ce délai, être contraint de remettre au client, après révocation du mandat, l’exemplaire qu’il détient.

Le mandant peut seulement exiger que mention de la révocation soit apposée sur l’exemplaire du mandat détenu par l’agent immobilier. 

Note de Mme Christine BARBEROT :

Jusqu’à l’arrêt commenté, l’agent immobilier paraissait soumis à deux injonctions légales contradictoires :

– Il pouvait être contraint, après révocation du mandat par le mandant, de lui restituer l’instrumentum. En effet, aux termes de l’article 2004 du Code Civil, « le mandant peut révoquer sa procuration quand bon lui semble, et contraindre, s’il y a lieu, le mandataire à lui remettre, soit l’écrit sous seing privé qui la contient, soit l’original de la procuration, si elle a été délivrée en brevet, soit l’expédition, s’il en a été gardé minute ». Cette restitution est une précaution qui a pour but de protéger le mandant en évitant que le mandataire ne continue à utiliser le mandat.

– Mais l’agent immobilier est également tenu par la loi du 2 janvier 1970 (art. 6) et le décret du 20 juillet 1972 (art. 72) de conserver pendant dix ans l’exemplaire du mandat qui reste en sa possession.

Pour l’agent immobilier, le point de départ du délai de conservation du mandat est celui de son terme imposé par l’article 7 de la loi, ou de sa révocation si elle a lieu avant ce terme.

En conséquence, pendant dix ans, le mandant, qui révoque le mandat, ne peut pas user de l’article 2004 du Code Civil en contraignant le mandataire à lui restituer l’original du contrat.

Le texte spécial, qui appartient à un ordre public de direction, déroge au texte général. Par suite, l’arrêt de la Cour d’appel est cassé pour avoir faussement appliqué l’article 2004 du Code Civil, texte général, et refusé d’appliquer les articles 6 de la loi du 2 janvier 1970, 72 et 86 du décret du 20 juillet 1972, textes spéciaux.

Source : AJDI, avril 2002, page 327