C.E. 5 Octobre 2005

Une convention prévoyant la faculté pour le preneur d’exercer à l’expiration du bail l’option d’achat d’un immeuble construit par le bailleur sur un terrain appartenant au preneur est un crédit-bail et non une vente à tempérament.

Note de M. Jean-Paul PIETRI :

Cet arrêt du Conseil d’Etat, relatif à un litige fiscal portant sur la déduction de charges, précise les éléments permettant de qualifier de contrat de crédit-bail une convention ayant pour objet la construction d’un immeuble par l’une des parties sur un terrain appartenant à une autre partie.

En l’espèce, un syndicat intercommunal avait signé avec une entreprise une convention prévoyant qu’il financerait pour elle la construction d’un bâtiment industriel.

Cette convention, qualifiée par les parties de « contrat administratif de location », prévoyait notamment que l’entreprise verserait une redevance pour la location du terrain et du bâtiment à construire et que celle-ci pourrait acquérir le bâtiment construit par le syndicat à l’issue de ce bail d’une durée de quatorze ans.

L’entreprise avait analysé cette convention comme un contrat de crédit-bail immobilier lui ouvrant droit à la déduction, en tant que charges assimilées à des loyers, des redevances versées chaque année au syndicat.

L’Administration fiscale a remis en cause ces déductions en estimant qu’elles correspondaient en réalité au prix d’acquisition d’une immobilisation effectuée dans le cadre d’un contrat de vente à tempérament.

Les dispositions applicables au crédit-bail, codifiées aux articles L. 313-7 et suivants du Code monétaire et financier, ne font pas obstacle à ce qu’une convention de crédit-bail immobilier soit conclue pour des constructions édifiées sur un terrain appartenant au crédit-preneur. L’article L. 313-7 en prévoit même explicitement cette possibilité.

Par ailleurs, l’article 555 du Code civil ne conduit pas à ce que la propriété du sol entraîne nécessairement le transfert au profit du crédit-preneur de la propriété des constructions devant être édifiées sur son terrain. Les dispositions de cet article ne s’appliquent pas dans les cas où le constructeur est lié au propriétaire par un contrat se référant aux ouvrages réalisés (Cass. 3e civ., 6 nov. 1970).

Les stipulations de ce contrat sont la seule loi applicable aux parties s’agissant de la propriété future de la construction. Ce contrat peut avoir la nature d’un bail emphytéotique (Cass. 3e civ., 16 avr. 1970), d’un bail à construction ou de toute autre forme de contrat.

Dans le cas d’espèce, seules les stipulations de la convention étaient susceptibles de déterminer la propriété future du bâtiment construit par le syndicat.

Le fait que le terrain d’assiette ait appartenu dès l’origine à l’entreprise n’avait donc aucun effet juridique sur le régime de transfert de la propriété du bâtiment, objet de la convention.

Ce qui caractérisait principalement en l’espèce un contrat de crédit-bail était la stipulation garantissant au crédit-preneur une option d’achat de la construction en fin de bail.

Source : Contrats et Marchés publics, 12/05, 311