Le juge des référés prononce la suspension d’un permis de construire dès lors qu’il y a urgence et qu’un moyen au moins est de nature à faire naître le doute sur la légalité de l’acte attaqué. Ces deux conditions relèvent, sauf erreur de droit ou dénaturation, de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Note :
1. Le nouveau référé-suspension issu de la loi du 30 juin 2000 a annoncé sa montée en puissance dans le contentieux de l’urbanisme. La suspension de l’acte attaqué est ordonnée à deux conditions :
1) qu’il y ait urgence,
2) qu’un moyen au moins soit « propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision » attaquée.
La décision rendue ne peut faire que l’objet d’un pourvoi en cassation. D’où l’intérêt de savoir exactement ce que contrôle le Conseil d’Etat.
2. Le Conseil d’Etat a déjà donné, souvent dans ses formations supérieures de jugement, des indications fort précises pour l’application de la nouvelle loi.
Urgence :
Il y a urgence lorsque la décision « préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre ». L’urgence s’apprécie globalement, compte tenu de l’intérêt qu’il peut y avoir à ce que l’acte attaqué reçoive malgré tout exécution. La décision doit être motivée du point de vue de l’urgence, que le juge des référés considère que la condition est remplie ou qu’elle ne l’est pas. Mais la question de savoir s’il y a ou non urgence relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Moyen propre à créer un doute sérieux :
Cette formulation est destinée à être plus souple que le « moyen sérieux » de l’ancien sursis. Si le juge des référés estime qu’un moyen est sérieux, il doit le désigner dans sa décision ; au contraire, s’il estime qu’aucun moyen n’est de nature à faire naître un doute sérieux, il peut se borner à utiliser cette formule. Le Conseil d’Etat s’en tient ici à la jurisprudence qu’il avait adoptée en matière de sursis.
La question de savoir si un moyen est ou non de nature à faire naître le doute relève de l’appréciation souveraine des juges du fond sous réserve de la dénaturation et surtout de l’erreur de droit, conçue de manière un peu plus large que dans le contrôle de cassation des décisions rendues en matière de sursis : constitue une erreur de droit la fausse interprétation d’un texte, par exemple, alors même que ses conditions d’application aux faits de l’espèce relèvent des juges du fond.
Même si les conditions d’une suspension sont réunies, le juge des référés peut rejeter la demande pour des motifs d’intérêt général.