Confirmation de l’annulation d’un permis de construire de régularisation fondé sur un bail emphytéotique consenti par son voisin au pétitionnaire dès lors que les clauses du bail retirent clairement au contrat les caractéristiques essentielles de l’emphytéose ; par suite, le bail ne peut être regardé comme un titre habilitant le pétitionnaire à construire sur les parcelles données à bail.
Commentaire de M. Patrice CORNILLE :
En l’espèce, le POS de la commune prévoyait un coefficient d’emprise au sol et limitait les constructions à usage d’habitation à 50 % d’emprise sur l’unité foncière ; une société d’HLM avait réalisé une résidence universitaire occupant 60 % de l’unité foncière d’origine, de sorte que son permis initial autorisait une construction surdensitaire.
Pour la régulariser la société avait obtenu un permis de construire de régularisation sur la base d’un bail emphytéotique consenti, sur une parcelle voisine du projet, par un office d’HLM.
Le fait qu’il soit suspect qu’un permis de régularisation soit délivré sur la base d’un bail emphytéotique ne permet pas d’obtenir l’annulation du permis concerné ; encore faut-il au préalable, rechercher si le bail emphytéotique peut concrètement avoir pour objet ou pour effet, au regard des règles d’urbanisme applicables, de régulariser les travaux.
Le Conseil d’Etat confirme donc indirectement qu’un bail emphytéotique, même s’il ne confère qu’un droit de superficie temporaire au preneur, peut en principe, constituer un titre suffisant pour permettre à un constructeur d’obtenir légalement un permis de construire (comp. CE, 15 févr. 1993).
Le Conseil d’Etat analyse ensuite, les stipulations du bail emphytéotique :
- qu’il ressort des pièces du dossier d’une part, que l’article 5 du bail (…) interdit au preneur de construire sur la parcelle et réserve la jouissance de celle-ci au bailleur, d’autre part que l’article 6 du même bail subordonne la cession du droit au bail ou la sous-location au consentement du bailleur et impose au preneur, dans ce cas, de rester garant et solidaire de l’exécution des conditions du bail ; que ces clauses, en apportant de telles limites à la liberté du preneur de construire, de jouir de la parcelle et de céder le bail, retirent clairement à celui-ci les caractéristiques essentielles de l’emphytéose.
Il est clair qu’on était en présence, en l’espèce, d’un « vrai-faux » bail emphytéotique ; sa conclusion entre le constructeur et son voisin n’avait en réalité pour objet que d’étendre artificiellement la superficie de l’unité foncière du projet, afin de permettre au constructeur, après coup, de respecter l’emprise maximale pour construire prévue par le POS.