C.E. 3 Décembre 2007

Quelles sont les illégalités d’un permis de construire qui peuvent entraîner la responsabilité de l’administration ?

Saisi d’une action en responsabilité à la suite de la délivrance d’un permis de construire illégal, le juge doit examiner toutes les illégalités susceptibles d’entacher ce permis et non s’en tenir aux seules illégalités retenues par le juge de l’excès de pouvoir pour en prononcer l’annulation.

Note de M. Jean-Claude BONICHOT :

Le juge administratif considère que toute illégalité de l’administration constitue une faute de nature à ce que soit engagée la responsabilité de la puissance publique.

Une telle illégalité a pu être constatée par le juge de l’excès de pouvoir dans une décision d’annulation. Elle a aussi pu ne pas être constatée préalablement à l’engagement de l’action en responsabilité. Cela peut arriver lorsque aucun recours pour excès de pouvoir n’a été formé.

Sauf dans le cas des décisions à objet exclusivement pécuniaire – ce que n’est pas un permis de construire – le caractère définitif d’un acte administratif ne s’oppose pas à ce que son illégalité soit invoquée à l’appui d’un recours en responsabilité.

Il se peut également, comme c’était le cas en l’espèce, qu’un recours ait été formé et l’annulation du permis de construire obtenue, mais que le juge administratif n’ait retenu, pour annuler, que certains moyens. Ce devrait, d’ailleurs, être de moins en moins le cas avec l’article L. 600-4-1 du Code de l’urbanisme.

Mais, comme le précise le commissaire du gouvernement dans ses conclusions, « les motifs qui ont conduit à l’annulation d’une décision administrative ne sont pas les seuls susceptibles d’engager la responsabilité de l’administration« .

En effet, d’une part, le juge du contentieux de la responsabilité peut être saisi de points qui n’ont pas été discutés devant le juge de l’excès de pouvoir. D’autre part, il peut être ressaisi de moyens écartés par le juge de l’excès de pouvoir car le rejet de moyens n’a pas d’autorité de chose jugée.

En revanche, les motifs d’annulation retenus par le juge de l’excès de pouvoirs ne peuvent qu’être retenus par le juge saisi du contentieux de la responsabilité car ils sont le soutien nécessaire du dispositif d’annulation et ont, avec lui, l’autorité absolue de la chose jugée.

Si, dans le contentieux de la responsabilité, le juge ne peut que constater l’illégalité du permis de construire sur les points pour lesquels son annulation a été prononcée, il a l’obligation de statuer sur tous les autres aspects de la légalité du permis qui sont avancés devant lui.

En l’espèce, le requérant faisait notamment valoir l’impossibilité de construire dans la bande des cent mètres.

Alors même que ce moyen n’avait pas été retenu par la Cour Administrative d’Appel ni le Conseil d’Etat précédemment pour annuler le permis, il devait être examiné dans le cadre de l’action en responsabilité sous peine d’erreur de droit, ce que sanctionne le Conseil d’Etat.

Source : BJDU, 6/07, page 447