L’acquéreur d’un fond peut attaquer le permis de construire accordé pour l’édification d’une construction sur le fond voisin, alors même que celle-ci est achevée et que l’acquisition est postérieure à cet achèvement.
Note :
1. Contrairement à ce que lui proposait son commissaire du gouvernement, le Conseil d’Etat confirme, en cassation, la solution retenue dans ce litige par la Cour Administrative d’Appel de PARIS statuant en formation plénière.
2. Voici une personne qui acquiert un fond et conteste le permis de construire délivré plusieurs années avant sur le fond voisin, sur lequel la construction est d’ailleurs achevée depuis longtemps. Deux raisonnements pouvaient être tenus. Le premier, en termes d’intérêt pour agir, consistait à se demander s’il faut admettre le recours de celui qui, en toute connaissance de cause, vient s’installer à côté d’un bâtiment existant, dont il a pu juger de toutes les caractéristiques. S’il lui semble gênant, rien ne l’oblige à venir s’installer à côté. Il n’est donc pas fondé à se plaindre d’une situation qu’il connaît et malgré laquelle il décide d’acheter le fond voisin. Ce raisonnement est couramment suivi, par exemple, dans le domaine de la responsabilité civile. C’est, en gros, celui que proposait le commissaire du gouvernement.
L’autre raisonnement consistait à partir du principe qu’un voisin a toujours qualité pour agir et que ne se pose à lui qu’un problème de délai. C’est celui suivi par la Cour de PARIS et par le Conseil d’Etat : il appartient au bénéficiaire du permis de prouver que le délai de recours est expiré et donc de faire la preuve de l’affichage et « la circonstance que [le] propriétaire voisin […] à la date d’introduction de la demande n’aurait acquis cette propriété que postérieurement à la réalisation des travaux faisant l’objet du permis […] est sans incidence ».
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Une telle jurisprudence fragilise considérablement les situations juridiques. Il suffit de penser au cas de l’acquéreur d’une maison : va-t-il falloir exiger de son vendeur que celui-ci lui donne toutes garanties quant à l’expiration du délai du recours pour excès de pouvoir ? Faut-il annexer les documents à l’acte ? Quelle va être la responsabilité du vendeur – et celle du notaire rédacteur de l’acte – si le permis, qui avait été accordé des années auparavant – et jusqu’où va-t-on remonter ? – est attaqué par l’acquéreur du fond voisin ?
De l’intérêt de vérifier, même plusieurs années après l’achèvement, que le permis est bien définitif, qu’il n’est plus susceptible de recours, notamment parce que l’affichage a bien été effectué et constaté.