C.E. 28 Mai 2003

Le Conseil d’Etat estime que les arrêtés d’occupation temporaire ne sont pas soumis aux dispositions de l’article L. 146-6 du Code de l’Urbanisme relatif à la protection des espaces naturels.

Note de M. Denis PIVETEAU :

En l’espèce, un arrêté préfectoral qui permettait l’occupation temporaire de propriétés privées, pris sur le fondement de la loi du 29 décembre 1892 « sur les dommages causés à la propriété privée pour l’exécution de travaux publics« , avait vu son exécution suspendue en raison des doutes sérieux quant à sa comptabilité avec les dispositions de l’article L. 146-6 du Code de l’Urbanisme.

Ce dernier article, issu de la loi littoral du 3 janvier 1986, vise, à protéger les « espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral« .

A ce titre, cet article interdit dans de tels sites les implantations qui n’auraient pas le caractère « d’aménagements légers« .

Sur le fond, la confrontation de l’arrêté litigieux, qui permettait de porter de non négligeables atteintes aux propriétés privées, et de cette disposition de protection de l’environnement, aurait relevé de l’appréciation souveraine du premier juge.

Mais encore fallait-il que cette confrontation soit possible. Or, par cet arrêt, le Conseil d’Etat estime que les deux législations sont indépendantes.

L’article L. 146-6 du Code de l’Urbanisme ne s’applique pas aux arrêtés d’occupation temporaire (et il en va sans doute de même pour l’ensemble des dispositions du même chapitre relatives à la protection du littoral).

Même si elle peut théoriquement durer jusqu’à cinq ans, la servitude que prévoit la loi de 1892 est d’essence temporaire.

L’administration utilise le sol, elle ne s’y implante pas.

Or l’article si L. 146-6 peut viser l’installation de certains équipements, il reste, même en cela, tourné vers des manières durables d’occuper l’espace littoral.

La jurisprudence a déjà eu, à plusieurs reprises, l’occasion d’y voir une législation indépendante de plusieurs autres pans du droit avec lesquels elle pouvait entrer en contact : législation sur l’expropriation (CE, 18 déc. 1974), législation sur le droit de construire et législation des installations classées (CE, 13 mars 1987), loi de 1979 sur la motivation des actes administratifs (CE, 15 déc. 2000).

Source : Droit Administratif, Août-Septembre 2003 page 43