Les recours contre un permis de construire sur renvoi de l’autorité judiciaire ne sont soumis à aucune condition de délai devant la juridiction administrative, même s’ils tendent à l’appréciation d’une décision administrative non réglementaire devenue définitive.
Echappe au régime des lotissements la construction d’un ensemble d’habitations édifiées sur la base d’un permis de construire unique en 1976 dès lors que la construction de ces habitations a précédé la division de la propriété foncière.
Note de M. Patrice CORNILLE :
Cet arrêt d’espèce du Conseil d’Etat est intéressant pour plusieurs raisons.
I – Il confirme d’abord une solution bien connue : lorsque le juge judiciaire est saisi d’une action en démolition, mise en conformité ou réparation fondée sur la violation des règles d’urbanisme en raison de la critique d’un permis de construire (C. Urb., art. L. 480-13), le juge judiciaire peut surseoir à statuer et renvoyer l’examen de la légalité du permis de construire devant le tribunal administratif (question préjudicielle).
Dans ce cas, le tribunal administratif peut être saisi sans aucune condition de délai.
Il est donc possible d’obtenir l’examen de la légalité du permis de construire, sur renvoi du juge judiciaire, même si les délais de recours pour excès de pouvoir ou retrait sont depuis longtemps expirés lorsque le juge judiciaire, puis le tribunal administratif, sont saisis par le demandeur (Cass. 3e civ. 8 févr. 1995 ; Trib. Conf., 16 mai 1994).
2 – Beaucoup plus novateur : l’arrêt précise ensuite un critère de distinction du lotissement et du permis « groupe d’habitations« .
On était ici en présence d’un permis « groupe d’habitations » ancien régime (C. Urb., art. R. 421-37), mais la solution paraît pouvoir être étendue au permis visé par l’article R. 421-7-1 du Code de l’Urbanisme.
La Haute Juridiction administrative précise que le critère de distinction est chronologique :
-si la division de l’unité foncière intervient avant l’implantation de bâtiments, l’autorisation requise est une autorisation de lotir (division en vue de l’implantation de bâtiments).
-si la construction des habitations a précédé la division de la propriété foncière, l’autorisation requise est un permis unique « groupe d’habitations » (construire en vue de diviser).
Ce critère chronologique apparaît nettement dans les conclusions du Commissaire du Gouvernement Laurent Touvet sur l’arrêt « Commune de La Clusaz » (CE 8 févr. 1999).