C.E. 23 Avril 2003

Un permis de construire ne peut légalement être retiré que dans le respect de la procédure contradictoire prévue à l’article 24 de la loi du 12 avril 2000.

Note de M. Jean-Claude BONICHOT :

La question était inédite dans la jurisprudence du Conseil d’Etat et elle est clairement tranchée par cette décision qui annule une ordonnance de référé : il faut, pour retirer un permis de construire, mettre le titulaire en mesure de présenter ses observations selon les exigences de la loi du 12 avril 2000.

Les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ce qui doit s’entendre de celles qui entrent dans son champ d’application alors même que leur motivation est prévue par des dispositions particulières, ne peuvent légalement être prises qu’après que l’intéressé a été mis en mesure de présenter des observations écrites.

Cette solution avait déjà été appliquée pour des arrêtés interruptifs de travaux. La portée de cette règle doit être précisée : elle joue même si, pour retirer l’acte, l’autorité administrative soutient que celui-ci a été obtenu par fraude. En effet, c’est bien lorsqu’une fraude est alléguée que les explications de l’intéressé méritent d’être recueillies au préalable, d’autant que celle-ci permet un retrait sans considération de délai. On rappellera par ailleurs que la fraude ne se présume jamais.

En revanche, il n’y a pas lieu à procédure contradictoire lorsque le retrait intervient sur demande de l’intéressé lui-même.

En ce qui concerne les modalités, la loi prévoit que le titulaire du permis de construire puisse demander à présenter des observations orales. Il peut le faire lui-même ou assisté par un conseil ou encore représenté par un mandataire de son choix.

La mise en œuvre loyale et donc légale de cette procédure suppose qu’un délai suffisant soit donné à l’intéressé pour qu’il réagisse. Selon certains auteurs, un délai de deux semaines qui peut être ramené à huit jours en cas d’urgence paraît admissible.

Les exceptions à la procédure contradictoire prévues par la loi paraissent peu susceptibles de jouer dans le domaine de l’urbanisme. Il s’agit de l’urgence et des circonstances exceptionnelles ou de l’ordre public et de la conduite des relations internationales.

L’urgence est toutefois une notion contingente : rares seront les cas tels que l’administration soit réellement obligée de retirer immédiatement le permis sans même laisser quelques jours au titulaire du permis pour s’expliquer.

La loi réserve encore les cas où serait prévue par voie législative une procédure contradictoire particulière, ce qui n’est pas le cas en matière de permis de construire.

Source : BJDU 2003 n° 2 page 95