C.E. 22 Octobre 2004

Le Conseil d’Etat vient de préciser les limites de l’irrecevabilité des recours des tiers installés après l’autorisation d’une installation classée.

Note de Mme Carine BIGET :

Les dispositions de l’article L. 514-6-III du Code de l’environnement ne font pas obstacle à ce que les tiers établis dans le voisinage d’une installation classée après l’autorisation d’ouverture de l’installation soient recevables à contester les actes postérieurs à leur établissement, modifiant ou complétant les prescriptions imposées à l’exploitant pour la protection de l’environnement, vient de décider le Conseil d’Etat dans un arrêt de section du 22 octobre 2004.

A la demande de M. Bonifas, riverain d’une meunerie, le Tribunal Administratif de Versailles avait modifié l’arrêté préfectoral du 20 avril 1994 imposant à cette dernière des prescriptions complémentaires au sens de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement.

La Cour Administrative d’Appel de Paris ayant rejeté la requête demandant l’annulation de ce jugement, la Société française de meunerie avait saisi le Conseil d’Etat.

Elle soutenait notamment que l’autorisation d’exploitation étant antérieure à l’acquisition de sa résidence par M. Bonifas, en application du 5e alinéa de l’article 14 de la loi du 19 juillet 1976 (devenu art. L. 514-6-III du Code de l’environnement), l’intéressé n’était pas recevable à attaquer l’arrêté du 20 avril 1994.

L’article L. 514-6-III dispose en effet que « les tiers qui n’ont acquis ou pris à bail des immeubles ou n’ont élevé des constructions dans le voisinage d’une installation classée que postérieurement à l’affichage ou à la publication de l’arrêté autorisant l’ouverture de cette installation ou atténuant les prescriptions primitives ne sont pas recevables à déférer ledit arrêté à la juridiction administrative« .

Le Conseil d’Etat a toutefois rejeté cette argumentation, estimant que, « si ces dispositions font obstacle à ce que les tiers mettent en cause la légalité des actes antérieurs à leur installation dans le voisinage qui déterminent les conditions de fonctionnement d’une installation classée, elles ne s’opposent pas, en revanche, à ce qu’ils contestent, s’ils y ont intérêt, les actes postérieurs à leur établissement et par lesquels l’autorité compétente modifie ou complète les prescriptions imposées à l’exploitant pour la protection de l’environnement« .

La Haute juridiction met ainsi fin à une contradiction entre la jurisprudence de la Cour Administrative d’Appel de Paris et celle de la Cour Administrative d’Appel de Nancy (CAA Nancy 6 juin 1996).

Source : AJDA, n° 37/04, page 2021