L’illégalité formelle tenant à l’absence de motivation d’une décision de préemption n’est pas de nature à engager la responsabilité de l’administration dès lors que les conditions légales d’exercice du droit de préemption sont réunies.
Note de M. Olivier CHAMBORD :
En l’espèce, il s’agissait d’un contentieux indemnitaire faisant suite à deux décisions suite à deux décisions successives des 12 février 1991 et 8 juillet 1992 par lesquelles un département a fait usage du droit de préemption en faveur des espaces naturels sensibles.
Ces décisions n’ont cependant pas abouti, le prix proposé étant inférieur à celui fixé dans la déclaration d’intention d’aliéner et la société propriétaire ayant à chaque fois renoncé à la vente.
Par lettre du 15 novembre 1993, le département a informé la société qu’il renonçait à exercer ce droit sur ce bien, finalement revendu en 1995 à un prix inférieur à celui figurant dans la première déclaration d’intention d’aliéner.
Ce qui a poussé la propriétaire à solliciter l’indemnisation des préjudices qu’elle estime avoir subis du fait des décisions de préemption.
Traditionnellement, si la décision est illégale, elle est par là même fautive.
Commettre une illégalité est toujours un faute (CE, 7 avr. 1976), quelle que soit sa gravité (CE, 26 janv. 1973).
En l’espèce, la décision de préemption n’était pas motivée : ce qui constitue manifestement une illégalité.
Toutefois, l’équation « illégalité égale faute » ne signifie pas que la faute que constitue l’illégalité est invariablement de nature à engager la responsabilité de l’Administration.
Le Conseil d’Etat relève ici que la Cour Administrative d’Appel a constaté souverainement « qu’eu égard à ses caractéristiques, à sa localisation et à ses dimensions, la préemption de cette propriété était nécessaire à la mise en œuvre de la politique des espaces naturels sensibles du département » et que, par suite, les conditions de fond des articles L. 142-1 et L. 142-3 du Code de l’urbanisme étaient remplies, excluant ainsi toute responsabilité de l’Administration, malgré l’illégalité formelle résultant de l’absence de motivation.
Pour que la responsabilité de l’Administration soit engagée, il faut que l’illégalité formelle se double d’une illégalité au fond.