C.E. 1er Octobre 2015

Un permis de construire modificatif élargi.

Note de Mme Lucienne ERSTEIN :

L’intérêt de la décision du 1er octobre 2015 (req. n°374338) est de revenir à une définition « traditionnelle » du champ possible d’intervention d’un permis de construire modificatif susceptible de régulariser un permis initial et, ainsi, de justifier une annulation partielle – et non pas totale – par le juge administratif de l’autorisation (C. urb., art. L. 600-5).

Selon une jurisprudence constante, le permis modificatif doit être sans influence sur la conception générale du projet initial (CE, 26 juill. 1982).

La modification de l’implantation d’un bâtiment peut affecter cette conception, mais seulement si elle est importante (CE, 8 nov. 1985).

Récemment, une décision détachait l’implantation de la conception générale et semblait ainsi mettre par principe toute modification de l’implantation du bâtiment en dehors du permis modificatif et donc de la possibilité d’une annulation partielle de l’autorisation initiale (CE, 4 oct. 2013). Aujourd’hui l’implantation entre à nouveau dans le rang de la conception générale.

Ainsi, une modification de l’implantation, comme d’ailleurs des dimensions ou de l’apparence du projet, ne suffit pas en elle-même à interdire le procédé du permis modificatif. C’est l’ampleur du changement, outre sa nature, qui peut remettre en cause la conception générale du bâtiment et donc faire obstacle à la délivrance légale d’une autorisation modificative de construire.

La Cour est censurée pour s’être arrêtée aux caractéristiques architecturales et au caractère indissociable des balcons, dont le surplomb de 44 cm aboutissait à une méconnaissance des prescriptions d’urbanisme sur la distance d’implantation des bâtiments. Elle aurait dû apprécier l’ampleur de la modification à apporter pour qu’il soit remédié à l’illégalité.

Autre intérêt de la solution apportée au présent litige, l’introduction d’une nouvelle condition pour que soit envisagée la délivrance d’un permis modificatif et donc une annulation partielle. Il faut que les travaux autorisés par le permis initial ne soient pas achevés.

Mais aucune des parties n’assume la charge de cette preuve, qui doit donc résulter des pièces du dossier. Et le juge n’a pas, dans le silence des pièces, à procéder à une mesure d’instruction pour s’assurer que les travaux ne sont pas terminés.

Enfin, la décision rappelle l’apport de l’article L. 600-5 du Code de l’urbanisme, issu de l’ordonnance du 18 juillet 2013.

Quand les éléments du projet ne sont pas divisibles, le texte permet désormais au juge, si l’illégalité affecte une partie identifiable et si celle-ci peut être régularisée par un permis modificatif, de ne procéder qu’à une annulation partielle.

Et, s’il l’estime nécessaire, le juge peut assortir sa décision d’un délai pour le dépôt d’une demande d’autorisation modificative (CE, 1er mars 2013).  

Source : JCP A, 41/15, 829