C.E. 18 Juin 2014 (2 avis)

Application dans le temps de la réforme du contentieux de l’urbanisme opérée par l’ordonnance du 18 juillet 2013.

Note de M. Rémi GRAND :

La redéfinition de l’intérêt à agir

La redéfinition, aux articles L. 600-1-2 et L. 600-1-3 du Code de l’urbanisme, de l’intérêt à agir en matière de contentieux des autorisations d’urbanisme est le volet de la réforme qui a le plus suscité d’interrogations portant sur son application aux instances en cours.

Dans un avis du 18 juin 2014, qu’il s’agisse de l’article L. 600-1-2, qui redéfinit l’intérêt à agir, ou de l’article L. 600-1-3, qui précise la date d’appréciation de cet intérêt, le Conseil d’État estime que, « s’agissant de dispositions nouvelles qui affectent la substance du droit de former un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative, elles sont, en l’absence de dispositions contraires expresses, applicables aux recours formés contre les décisions intervenues après leur entrée en vigueur« .

Annulation partielle et possibilité de régularisation

La question de l’applicabilité aux instances en cours de l’article L. 600-5 était également soumise au Conseil d’Etat, lequel article, réécrit par l’ordonnance de 2013 sans en bouleverser la portée, traite de l’annulation partielle d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir dans l’hypothèse où un vice n’affecte qu’une partie du projet et peut être régularisé par un permis modificatif, et prévoit désormais que le juge peut « fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation« , pouvoir déjà reconnu au juge par la jurisprudence.

Le Conseil d’État considère que « ces nouvelles dispositions, qui instituent des règles de procédure concernant exclusivement les pouvoirs du juge administratif en matière de contentieux de l’urbanisme, sont, en l’absence de dispositions expresses contraires, d’application immédiate aux instances en cours, quelle que soit la date à laquelle est intervenue la décision administrative contestée.

Elles peuvent être appliquées pour la première fois en appel« .

Dispositions tendant à punir les auteurs de recours abusifs

Dernière disposition dont la question de l’application dans le temps était soumise au Conseil d’État : l’article L. 600-7 qui, à la demande du défendeur, offre la possibilité au juge qui estime que le droit de former un recours contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager est mis en œuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, de condamner l’auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts.

Là encore, constatant que ces dispositions « instituent des règles de procédure concernant exclusivement les pouvoirs du juge administratif en matière de contentieux de l’urbanisme« , le Conseil d’État considère qu’elles sont d’application immédiate aux instances en cours, quelle que soit la date à laquelle est intervenue la décision administrative contestée, et qu’elles peuvent être appliquées pour la première fois en appel.

Source : Dalloz Actualité, 20 juin 2014