Commentaire de Monsieur MAUBLANC :
Le présent arrêt rendu par le Conseil d’Etat offre un intérêt certain dans la mesure où il étend au preneur d’un immeuble, assujetti à la TVA, l’obligation de reverser la taxe déduite à l’occasion de gros travaux, qui semblait jusqu’alors seulement applicable au seul bailleur d’immeuble en cas de cession de ce dernier.
I – La résiliation du bail oblige-t-elle le preneur à reverser la TVA déduite à l’occasion de gros travaux immobiliers ?
Un assujetti à la TVA, qui a déduit la taxe afférente à des travaux de grosses réparations ou d’amélioration effectués sur les immeubles qu’il a pris à bail, est-il tenu de régulariser ladite déduction lorsque le bail est interrompu ?
L’article 210 de l’annexe II au Code Général des Impôts prévoit cette régularisation, et donc le reversement de la TVA initialement déduite :
– lorsque l’immeuble qui a fait l’objet de travaux est cédé dans un certain délai suivant son acquisition ou son achèvement (avant la neuvième année pour les immeubles livrés, acquis ou apportés avant le 1er janvier 1996 ; avant la dix-neuvième année à compter de cette date) ;
– et lorsque la cession de l’immeuble n’est pas soumise à la TVA sur le prix total ou la valeur totale de l’immeuble.
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La difficulté se rapportait à l’existence ou non d’une cession d’immeuble dont dépendait le bien-fondé du reversement de la TVA initialement déduite par le preneur à l’occasion des travaux de grosses réparations qu’il a réalisés. Le Conseil d’Etat n’a pas débattu du point de savoir si les circonstances de fait révélaient ou non une cession de l’immeuble. Usant d’une motivation générale et particulièrement explicite, l’arrêt relève qu’il résulte de la combinaison des articles 210 de l’annexe II au Code Général des Impôts, instituant cette régularisation, et de l’article 216 quater de la même annexe que « le mécanisme de régularisation est applicable aux assujettis qui ont déduit la taxe afférente à des travaux de grosses réparations ou d’amélioration effectués sur un immeuble dont ils étaient locataires, lorsqu’ils cessent de l’être avant le commencement de la neuvième année qui suit celle de la réalisation des travaux ».
II – La présomption d’assimilation du preneur au propriétaire de l’immeuble
La solution retenue par le Conseil d’Etat repose sur une combinaison des textes applicables. L’article 216 bis de l’annexe II au Code Général des Impôts dispose que la taxe qui a grevé certains biens constituant des immobilisations et qui sont utilisés pour la réalisation d’opérations imposables peut être déduite dans les conditions prévues aux articles 216 ter et 216 quater de l’annexe II du même code, par l’entreprise utilisatrice qui n’en est pas elle-même propriétaire. L’article 216 ter de la même annexe explicite la nature des immobilisations en cause et prévoit que la taxe déductible est celleafférente aux travaux de grosses réparations ou d’amélioration des immeubles à la charge du preneur. Enfin, l’article 216 quater I de la même annexe est relatif à l’exercice du droit à déduction et prévoit que la taxe déductible est celle due ou supportée soit par le propriétaire, soit par l’utilisateur, à raison de l’acquisition ou de la construction du bien, ou de la réalisation des travaux. Cette disposition ajoute que « la mise à disposition ou l’entrée en jouissance du bien, le retrait ou l’interruption dans la jouissance du bien sont assimilés à des transferts de propriété ».