C.E. 15 juin 2001

Si l’article L.213-11 du Code de l’Urbanisme exige que la collectivité publique qui décide de vendre un bien préempté avant l’expiration du délai de dix ans en informe le propriétaire initial et l’acquéreur évincé afin de leur permettre de le racheter, cette formalité peut être remplie après que le principe de cette vente ait été décidé pourvu qu’elle le soit avant que le contrat ne soit passé. 

Note :

1. On sait que le juge administratif n’est pas formaliste. Ne l’est-il pas ici trop peu ?

Même si cela devrait aller sans le dire, le Code de l’Urbanisme prend la peine de le préciser : les biens acquis par voie de préemption doivent être utilisés pour l’un des objets pour lesquels cette préemption est possible. La formule de l’article L.213-11, 1er alinéa, constitue d’ailleurs déjà un arrangement avec la rigueur puisque, normalement, la préemption n’a pu être mise en œuvre que pour un projet précis qui a dû être explicité dans les motifs de la décision. Le droit, pour la collectivité publique, d’en disposer à d’autres fins au bout d’un certain délai en est un autre. Au demeurant, ce délai de dix ans vient d’être ramené à cinq par l’article 19-II de la loi SRU, du 13 décembre 2000.

Si la collectivité publique entend se séparer du bien qu’elle avait acquis sans l’utiliser dans l’un des buts prévus par la loi (art. L.210-1 du Code), elle doit mettre le propriétaire initial et l’acquéreur évincé en mesure de le lui racheter par priorité. Tel est le cas du mécanisme de rétrocession de l’article L.213-11. A cet effet, l’administration doit commencer par « informer » les intéressés de son intention – de sa décision – de vendre.

A quel moment doit avoir lieu cette information ? Doit-elle être faite avant même que ne soit décidé le principe de la vente ou peut-elle avoir lieu après ? C’est à cette question que répond l’arrêt rapporté qui infirme une ordonnance de référé du juge des référés du tribunal administratif de NICE.

2. Le principe même de la vente avait été décidé par le conseil municipal de NICE sans en informer le propriétaire initial ni l’acquéreur évincé et la vente avait été confiée au marché immobilier des notaires. C’est l’acquéreur évincé qui avait demandé la suspension de la délibération qu’avait accordée le juge des référés.

Le Conseil d’Etat juge que la commune peut informer les intéressés de sa décision de vendre après que le conseil municipal se soit prononcé sur le principe même de la vente.

La procédure de l’article L.213-11 peut être mise en œuvre après, pourvu qu’elle le soit avant que la vente ne soit passée avec quelqu’un d’autre. Il en résulte – c’est ce que dit le Conseil d’Etat en se prononçant lui-même sur le référé après avoir annulé l’ordonnance attaquée – qu’il n’y a aucune urgence à suspendre la délibération contestée.

Source : BJDU, 2001 n° 4 page 266