C.E. 12 Avril 2013

Effets de la prescription trentenaire en matière d’installations classées.

Note de Mme Marie-Christine de MONTECLER :

L’obligation de remise en état du site d’une installation classée se prescrit toujours par trente ans, même après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 réformant la prescription en matière civile.

Mais cette prescription est sans effet sur l’exercice par l’autorité administrative de ses pouvoirs de police et sur l’éventuelle responsabilité de l’Etat. C’est ce qui ressort d’un arrêt du Conseil d’Etat du 12 avril 2013.

En l’espèce, la SCI Chalet des Aulnes avait obtenu du juge des référés du Tribunal Administratif d’Orléans qu’il ordonne une expertise de l’état d’un terrain antérieurement propriété de Gaz de France.

Saisie par GDF Suez, la Cour Administrative d’Appel de Nantes avait annulé cette ordonnance en estimant que l’expertise n’avait plus d’utilité du fait de l’acquisition de la prescription trentenaire.

Le principe de la prescription trentenaire en matière de remise en état d’installations classées ayant cessé d’être exploitées résulte de l’arrêt Alusuisse-Lonza France (CE, ass., 8 juill. 2005). Le Conseil d’Etat avait alors appliqué, non pas directement l’article 2262 du Code civil, mais « les principes dont s’inspire » cette disposition.

Ce qui fait qu’il peut juger implicitement dans l’arrêt du 12 avril que la modification des règles du Code civil par la loi du 17 juin 2008 est sans effet sur le délai de prescription de l’action contre l’ancien propriétaire en matière d’installations classées. Toutefois, l’arrêt Alusuisse précisait expressément que cette prescription était sans effet sur les pouvoirs de police spéciale du préfet en la matière qui peuvent « être exercés […] à toute époque« .

Par conséquent, en jugeant que l’expertise n’avait pas d’utilité, « alors que la prescription trentenaire susceptible d’affecter l’obligation de prendre en charge la remise en état du site pesant sur l’exploitant d’une installation classée, son ayant-droit ou celui qui s’est substitué à lui, est sans incidence, d’une part, sur l’exercice, à toute époque, par l’autorité administrative des pouvoirs de police spéciale conférés par la loi en présence de dangers ou inconvénients se manifestant sur le site où a été exploitée une telle installation, et, d’autre part, sur l’engagement éventuel de la responsabilité de l’Etat à ce titre, le juge des référés de la Cour d’Administrative d’Appel de Nantes a entaché son ordonnance d’erreur de droit« .

Source : AJDA, 14/13, page 765