C.A. VERSAILLES 19 Février 2013

Sur les conséquences de l’absence de respect des formalités de cession du droit au bail.

Note de Mme Emmanuelle CHAVANCE :

L’article L. 145-16 du Code de commerce déclare nulles toutes les clauses qui interdiraient au locataire de céder son droit au bail à l’acquéreur de son fonds de commerce, mais les clauses restrictives ou imposant des conditions de forme ou d’agrément ont été validées par la jurisprudence.

Dans l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 19 février 2013, le bail stipulait qu’outre le fait que le bailleur disposait dans le cadre de la cession du droit au bail à l’acquéreur du fonds de commerce d’un droit de préférence, la cession ne pouvait intervenir qu’après agrément préalable et par écrit du bailleur avec l’obligation pour le preneur de le faire concourir à l’acte de cession après communication intégrale du projet d’acte.

Il découle désormais d’une jurisprudence constante que les clauses prévoyant un agrément ou une autorisation préalable sont licites, de même que celles imposant d’appeler le bailleur à l’acte de cession.

En l’occurrence, le bailleur avait autorisé la cession du droit au bail à l’acquéreur du fonds de commerce, mais en soumettant cette autorisation au respect de quatre conditions dont une n’avait pas été respectée. Par ailleurs, le bailleur n’avait pas été appelé à concourir à la signature de l’acte.

L’inobservation par le preneur des clauses soumettant la cession à certaines conditions peut être sanctionnée par :

– le refus de renouvellement pour motif grave et légitime fondé sur l’article L. 145-17 du Code de commerce, aucune mise en demeure n’étant exigée en présence d’une cession de droit au bail irrégulière ;
– la résiliation judiciaire du bail fondée sur l’article 1184 du Code civil ;
– l’acquisition de la clause résolutoire fondée sur l’article L. 145-41 du Code de commerce, à condition qu’un commandement ait été préalablement signifié même si l’infraction est irréparable ;
– l’inopposabilité de la cession au bailleur dès lors qu’elle est réalisée en contravention avec les conditions prévues par les conventions locatives.

En tout état de cause, l’inobservation des dispositions contractuelles concernant les formes à respecter pour la cession d’un fonds de commerce ne peut être invoquée par le cessionnaire au soutien d’une demande de nullité de l’acte de cession.

C’est dans ce sens qu’a statué la Cour de cassation dans un arrêt du 1er avril 2008 en décidant que « seul le bailleur peut se prévaloir du défaut de respect d’une clause imposant son intervention à l’acte de cession qui est édicté dans son intérêt exclusif : le fait que l’inobservation de la clause d’intervention du bailleur à l’acte place le cessionnaire dans une situation d’incertitude juridique à l’égard du bailleur ne peut constituer un préjudice dont le cessionnaire peut se prévaloir pour solliciter la nullité de la cession« .

Source : Loyers et copropriété, 4/13, page 20