Logements vendus comme bureaux : recours de l’acheteur.
Des Sociétés Civiles de Placement Immobilier (SCPI) avaient acheté des bureaux à Paris pour 23 millions de francs en 1990. Or le vendeur avait acquis les locaux en 1988, pour 9,2 millions de francs, comme logements.
La préfecture ayant écrit en 1997 au locataire pour lui indiquer que les locaux étaient occupés en contravention avec l’article L 631-7 du Code de la Construction et de l’Habitation (CCH), l’occupant avait quitté les lieux.
Les SCPI avaient donc engagé un recours envers leur vendeur et le notaire. Elles obtiennent gain de cause à l’encontre du vendeur.
L’acte de vente de 1988 précisait que le notaire avait informé les parties que les locaux ne pouvaient être affectés à usage de bureaux.
Les vendeurs invoquaient une lettre de la préfecture indiquant que « l’affectation commerciale ne soulève pas d’objection » et évoquant la redevance pour création de bureaux. Ce document était insuffisant :
« Considérant que l’affectation des lots à l’usage de bureaux n’était pas interdite par le règlement de copropriété ;
Considérant que s’agissant de l’affectation au regard de la réglementation administrative, l’acte de vente comporte en annexe la lettre ci-dessus du 7 décembre 1988, outre l’original de la déclaration de recette de la somme de 315.000 F au titre de la redevance pour création de bureaux en date du 19 avril 1989 ;
Considérant toutefois que la lettre en cause constituait une réponse à une demande de renseignements ; qu’elle ne pouvait s’entendre de l’autorisation administrative prévue par l’article L. 631-7 ; qu’aucune demande n’est produite, non plus que l’avis du maire nécessaire pour l’instruction du dossier, que l’autorisation est préalable ;
Que la redevance qui a été acquittée ne saurait valoir ou remplacer l’autorisation dès lors qu’elle a seulement trait à la fiscalité liée à l’affectation des locaux à usage professionnel (…) ;
Considérant en conséquence que les biens immobiliers vendus étaient affectés d’un vice juridique les rendant impropres à leur destination dès lors que l’administration a mis en demeure tant les propriétaires que le locataire de les restituer à leur usage antérieur d’habitation, et que le premier juge doit être approuvé d’avoir retenu que formée dans les 3 mois du rejet du recours gracieux, la demande n’était pas tardive au regard du bref délai ; Considérant que si la lettre du 17 décembre 1988 n’emportait pas autorisation elle attestait de la possibilité de transformer l’affectation et que le notaire n’avait pas à rechercher si cette autorisation avait été demandée, voire si l’autorisation était assortie de conditions pouvant s’imposer à l’acquéreur ; qu’il a joint à son acte les justificatifs produits et non contestés et n’avait pas de garantie à donner sur la nature juridique ou administrative des locaux objets de la vente et qui étaient décrits comme des bureaux ; qu’à la date de l’acte, antérieur à la loi du 21 juillet 1994, ayant instauré l’existence d’un certificat spécifique sur l’affectation en bureaux, il n’existait pas de document autre qu’une lettre de l’administration pour attester de cette situation ; que rien ne permettait au notaire d’envisager que la Préfecture de Paris viendrait plusieurs années après l’acte qu’il avait reçu notifier l’obligation de restituer les lieux à leur usage antérieur d’habitation ; que la responsabilité de Me … sera donc écartée ».
La Cour condamne le vendeur à verser aux SCPI la somme de 300.000 €.
Note :
Dans l’attente de la réforme de l’article L 631-7 du CCH, cette décision du 9 mars 2005 de la Cour d’appel de Paris illustre les contentieux liés à l’affectation des locaux.
Si les vendeurs avaient bien payé la redevance pour création de bureaux, ils n’avaient pas obtenu d’autorisation formelle d’affectation des locaux en bureaux.
Une simple lettre, à titre de renseignement, indiquait que l’affectation commerciale ne soulevait pas d’objection. Elle est insuffisante.