C.A. PARIS 9 Juin 2004

Une entreprise générale ne peut arguer de ce qu’elle aurait sous-traité les travaux pour être exonérée de sa responsabilité sur le fondement du trouble anormal de voisinage envers des tiers et le maître de l’ouvrage, cette dernière devant voir sa responsabilité également retenue en tant que voisin occasionnel, conformément aux clauses contractuelles prévues au marché.

Note de Mme PAGES – de VARENNE :

Pendant longtemps, seul le maître de l’ouvrage pouvait être recherché sur le fondement du trouble anormal de voisinage.

Puis, la jurisprudence a admis, à compter d’un arrêt rendu par la troisième chambre civile en date du 30 juin 1998 que l’entrepreneur – en l’espèce, un sous-traitant – pouvait être tenu responsable du trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage résultant de l’exécution des travaux subis par le voisin, sans qu’il soit nécessaire de caractériser sa faute.

Quid du sort de l’entrepreneur principal qui a sous-traité les travaux ?

La question était abordée dans cet arrêt du 9 juin 2004 de la Cour d’appel de Paris.

Une entreprise principale, la Société Eiffage, avait été condamnée en première instance sur le fondement du trouble anormal de voisinage in solidum avec le maître de l’ouvrage à indemniser le voisin.

Sur l’appel interjeté par la Société Eiffage, le maître de l’ouvrage débouté en première instance de la demande en garantie qu’il avait parallèlement formée à son encontre fait un appel incident.

La Cour infirme le jugement en ce qu’il a débouté le maître de l’ouvrage de son appel en garantie, au motif que :

« Il ressort des termes du marché qu’elle a contracté et plus précisément des clauses techniques particulières, qu’elle est seule responsable des dégâts ou désordres occasionnés aux immeubles avoisinants par ses travaux, véhicules ou appareils (article 2.11.3).

Le fait qu’elle ait sous-traité ces travaux ne peut l’exonérer de cette responsabilité envers les tiers, de même qu’envers le Maître de l’ouvrage.

Celui-ci, initiateur du chantier, est responsable au premier chef des troubles anormaux de voisinage, que l’exécution de l’ouvrage cause aux tiers, mais l’entrepreneur général doit voir sa responsabilité également retenue en tant que voisin occasionnel pendant les quelques mois qu’ont duré les travaux.

Mais, par l’effet de cette clause contractuelle, qui fait peser sur elle la responsabilité des dommages aux immeubles avoisinants, la Société Eiffage doit être condamnée à garantir le Maître de l’ouvrage (…) de toutes condamnations relatives aux dommages subis par les occupants des immeubles avoisinants (…) ».

Source : Construction-Urbanisme, Sept. 2004, page 11