C.A. PARIS, 6 janvier 2000

Sont valablement établies et opposables au syndicat des copropriétaires les servitudes constituées par le vendeur en vertu des pouvoirs donnés en application de l’article R.261-5 CCH.

Note de M. Daniel SIZAIRE :

Le vendeur avait mis en œuvre un premier immeuble en prévoyant l’éventualité de la réalisation d’un deuxième immeuble sur un terrain contigu dont il n’était pas encore propriétaire.

Dans un acte de 1988, portant règlement de copropriété et état descriptif de division de l’immeuble 1, il était dit que cet immeuble serait grevé « d’une servitude de passage tous usages sur la voirie et de branchements sur l’ensemble des réseaux » au profit de l’immeuble 2, lequel participerait aux charges d’entretien, de réfection et de réparation de la voirie et des réseaux communs au prorata des surfaces édifiées. Tous les acquéreurs de l’immeuble 1 avaient, dans les actes de vente, donné tous pouvoirs à la SCI venderesse pour régulariser cette servitude, ce qui avait été fait par actes notariés ultérieurs de 1989 et 1990 qui en précisaient les modalités.

Pourtant le syndicat des copropriétaires de l’immeuble avait fait assigner la SCI venderesse en nullité de ces actes et en tout cas en inopposabilité à son égard et dommages-intérêts, faisant valoir :

– d’une part que la SCI avait outrepassé les pouvoirs qui lui avaient été donnés, que la seule servitude décrite dans l’état de division était celle figurant au plan de servitudes annexé à celui-ci, concernant l’alimentation PTT et des canalisations d’eau ;

– d’autre part que les syndicats des copropriétaires des immeubles 1 et 2 étaient seuls habilités, représentés par leurs syndics, à consentir des actes de disposition sur les parties communes, l’unanimité recueillie auprès des acquéreurs ne pouvant suppléer la nécessaire décision des assemblées générales des copropriétaires.

 …/… 

Ayant constaté que les servitudes constituées par la SCI ne différaient pas de la « servitude de passage tous usages sur la voirie et de branchements sur l’ensemble des réseaux » prévue par l’acte de 1988 (état descriptif), dont elle ne constituait que la mise en œuvre, « étant observé que le singulier employé par l’acte peut être tenu pour générique et ne signifie pas qu’une seule servitude devait être créée », que d’ailleurs les servitudes litigieuses n’étaient pas davantage contraires au plan annexé à l’acte précité, dès lors que ce plan ne faisait apparaître que les servitudes d’eaux usées et pluviales ainsi que la servitude PTT et ne comportait aucune mention des servitudes de passage tous usages et de branchements sur l’ensemble des réseaux, pourtant expressément stipulées audit acte ; que d’ailleurs, le plan joint était qualifié de « plan masse d’intention » ; la CA a déclaré le syndicat des copropriétaires mal fondé en ses demandes.

La solution doit être approuvée.

I – Il ne peut être opposé l’organisation collective du syndicat des copropriétaires résultant de la loi du 10 juillet 1965 aux conventions passées entre le vendeur et les acquéreurs, devenus par la suite copropriétaires, antérieurement à l’existence du syndicat des copropriétaires, lequel ne prend naissance qu’à l’achèvement de l’immeuble.

II – Par exception au principe de la spécialité du mandat ayant pour objet de tels actes, le même article R.261-5 admet la validité d’un mandat général dès lors que les actes de disposition sont nécessaires pour assurer la desserte des immeubles concernés par le mandat ou leur raccordement avec les réseaux de distribution et les services publics, ce qui était le cas en l’espèce.

Paradoxalement, apporter trop de précisions peut soulever des discussions. Le fait que les servitudes de passage tous usages de branchements n’étaient pas mentionnées sur le plan annexé à l’état de division a été considéré par l’arrêt laisser certaines latitudes.

Source : CONSTRUCTION-URBANISME, août 2000 page 7