C.A. PARIS 20 Octobre 2005

Une société avait mis en vente des locaux de bureaux. Une promesse de vente avait été préparée par le notaire du vendeur, signée par les bénéficiaires et adressée au vendeur avec un chèque pour le paiement des droits d’enregistrement. Le projet d’acte prévoyait d’autoriser les bénéficiaires à effectuer des travaux dans les locaux, dès avant signature de l’acte authentique.

Or le vendeur avait ensuite retourné le projet d’acte et signé une promesse de vente avec un autre acquéreur, pour un prix plus élevé. La Cour d’appel estime qu’il y a eu de la part du propriétaire une rupture abusive de pourparlers :

« Considérant qu’il résulte de cet échange de télécopies que (le notaire du propriétaire) a d’abord envoyé (au notaire des candidats acquéreurs) un projet de promesse de vente, puis à réception des « derniers éléments manquants », un projet de promesse de vente définitif, qui n’était pas un simple document de travail comme le soutient l’intimée, puisqu’elle était établie en trois exemplaires et devait être retournée accompagnée des frais d’enregistrement,

Considérant que cet envoi de promesses de vente, par chronopost et non plus par télécopie, à l’initiative du notaire mandataire de la promettante, exprimait donc une pollicitation ferme de la part de la société Ox Promotion (propriétaire) ;

Que ce projet définitif n’ayant pas été, toutefois, ratifié par la promettante, cette dernière n’est pas engagée par un document qui n’a été signé que par les bénéficiaires de la promesse ;

Considérant que, selon les écritures de l’intimée, celle-ci a fait visiter les locaux dont s’agit à des « acquéreurs potentiels » le 4 mai 2000, jour même de la signature de la promesse de vente par les appelants ; (…)

Considérant qu’il résulte de ces éléments que la rétractation de la société Ox Promotion était motivée par la réception, concomitante à la signature par les appelants de la promesse de vente du 4 mai 2000, d’une offre d’achat apparaissant plus intéressante que celle qui avait été formulée par ces derniers ; (…)

Que cette rétractation brutale et imprévue de la société Ox Promotion, à un stade aussi avancé des négociations, concrétisé par un échange de correspondances, l’envoi d’une promesse de vente présentée comme « définitive » et le paiement par les bénéficiaires des frais d’enregistrement, est constitutive d’une rupture abusive de pourparlers et engage la responsabilité de l’intimée, laquelle ne peut, a posteriori, justifier cette rupture par la précipitation des bénéficiaires à faire réaliser par la S.A.R.L. Sapierre, dès le 2 mai 2000, des travaux de démolition qui étaient autorisés au terme du dernier état de la promesse de vente, même si cette exécution était prématurée au regard de la convention projetée, qui prévoyait que ces travaux ne pourraient être entrepris que dès le retour de la promesse signée et la production d’une attestation d’assurance, dès lors que la hâte des bénéficiaires à supprimer les cloisonnements équipant les locaux litigieux, quoique inopportune, ne révélait aucune mauvaise foi de leur part et n’était pas de nature à causer quelque préjudice que ce soit à la société Ox Promotion, lesdits travaux devant être réalisés, aux termes du projet de promesse « définitive », aux risques et périls de leurs exécutants ;

Qu’en ces circonstances, la société Ox Promotion ne justifie d’aucun motif légitime de rétractation de son consentement à la vente. »

Source : Juris Hebdo, 8 Novembre 2005, page 3