C.A. PARIS, 13 février 2003

Dassault avait vendu à une SCI un terrain de 1518 m² à Suresnes pour 6,20 MF en 1994.

Sur ce terrain, diverses constructions devaient être démolies.

Les permis de démolir et de construire avaient été obtenus en 1993 pour édifier 8 logements.

Or la SCI avait découvert après avoir construit plusieurs maisons, lors de terrassement pour construire un immeuble, que le terrain était pollué par des produits chimiques.

La pollution résultait de l’usage d’huiles par le précédent propriétaire, Renault, entre … 1928 et 1941 !

La SCI demandait à son vendeur, Dassault, le remboursement des frais de dépollution, de l’ordre de 2 MF.

La Cour d’appel de Paris condamne le vendeur au paiement des frais de dépollution, mais rejette l’action exercée par le vendeur contre le propriétaire antérieur :

« Sur le défaut d’information :
Considérant, en droit, qu’en vertu de l’article L. 514-20 du code de l’environnement, issu de la loi du 13 juillet 1992 ayant modifié la loi du 19 juillet 1976 :

« Lorsqu’une installation soumise à autorisation a été exploitée sur un terrain, le vendeur de ce terrain est tenu d’en informer par écrit l’acheteur ; il l’informe également, pour autant qu’il les connaisse, des dangers ou inconvénients importants qui résultent de l’exploitation.

A défaut l’acheteur a le choix de poursuivre la résolution de la vente ou de se faire restituer une partie du prix ; il peut aussi demander la remise en état du site aux frais du vendeur, lorsque le coût de cette remise en état ne paraît pas disproportionné par rapport au prix de vente » ; (…) Considérant que les dispositions susdites sont applicables aux installations de la nature de celles soumises à autorisation sous l’empire de la loi du 19 juillet 1976 modifiée alors même qu’elles auraient cessé d’être exploitées antérieurement à son entrée en vigueur dès lors que ces installations restent susceptibles, du fait de leur existence même, de présenter les dangers ou inconvénients mentionnés à l’article L. 511-1 ; (…)

Considérant qu’il en résulte que, infirmant le jugement déféré, il convient de dire la société Dassault Aviation tenue de supporter le coût de la remise en état du site, laquelle, chiffrée à la somme non contestée de 263738 € HT au titre de la dépollution des terres et de 4059 € HT au titre des forages nécessaires en cours d’expertise, n’est pas disproportionnée au regard du prix de vente qui s’est élevé à 945 183 € (6 200 000 F) ».

La Cour d’appel rejette le recours en garantie formé pour Renault au motif que l’obligation d’information instaurée par la loi de 1992 n’était pas applicable à une vente de terrain conclue en 1962.

Note :

Cet arrêt très intéressant fournit un exemple du risque lourd qui pèse sur les parties lorsque le bien vendu est pollué.

L’article L 514-20 du Code de l’environnement impose au vendeur une obligation d’information.

Si cette obligation n’est pas respectée, l’acquéreur peut poursuivre la résolution de la vente ou se faire rembourser une partie du prix ou demander la remise en état du site aux frais du vendeur.

La loi limite cette dernière faculté à un coût qui ne soit pas « disproportionné avec le prix de vente ».

La Cour d’appel de Paris estime donc qu’un coût du tiers du prix n’est pas disproportionné.

Cet arrêt indique par ailleurs que l’obligation d’information du vendeur s’applique même si l’exploitation du terrain qui a donné lieu à pollution est antérieure à la loi de 1976, ce qui était le cas en l’espèce.

Cette décision est à conserver en mémoire pour les promoteurs qui peuvent y trouver argument à l’égard des vendeurs de terrains qu’ils acquièrent.

Source : JURIS-HEBDO, 25 Mars 2003 page 2