C.A. PARIS 11 Octobre 2007

Preuve de l’affectation commerciale d’un local et conséquences sur un bail consenti en violation de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation.

En dépit du fait que l’affectation d’un local au 1er janvier 1970 peut être rapporté par tout mode de preuve, la seule signature d’un bail commercial ne suffit pas à lui conférer une nature commerciale.

La preuve étant rapportée que les locaux étaient en réalité à usage d’habitation et en l’absence d’autorisation de changement d’affectation, le bail doit être déclaré nul.

Note de Mme Emmanuelle CHAVANCE :

La question posée dans l’arrêt de la Cour d’appel de Paris concernait les modalités de preuve du caractère commercial d’un appartement.

En l’occurrence, l’appelant était titulaire depuis 1969 d’un bail commercial plusieurs fois renouvelé sur un local situé au 4e étage d’un immeuble parisien décrit comme un appartement d’habitation mais dont la destination était mixte d’habitation et pour l’exercice du commerce de confection de vêtements de sport.

À la suite d’un congé avec dénégation de statut signifié par le nouveau propriétaire pour défaut d’immatriculation, absence d’exploitation commerciale et utilisation de l’appartement à titre d’habitation principale par l’ancienne épouse du preneur, les juges de première instance avaient décidé que le locataire ne bénéficiait pas du statut des baux commerciaux et autorisé son expulsion.

Les locataires ont interjeté appel de ce jugement en demandant que soit prononcée la nullité des baux commerciaux compte tenu de la nature des locaux à usage d’habitation au 1er janvier 1970 et la requalification du bail en bail d’habitation.

Après avoir rappelé les dispositions de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation et le principe selon lequel la preuve de l’usage d’un local au 1er janvier 1970 pouvait se faire par tous moyens, la Cour d’appel de Paris a précisé que « la seule signature d’un bail commercial suffit pas à conférer au local la nature commerciale« .

En revanche, la Cour s’est fondée sur l’absence d’autorisation de la Préfecture pour la transformation des locaux à caractère commercial, la désignation des locaux dans l’acte de vente de 2001 comme un appartement de quatre pièces sans aucune mention d’un caractère commercial, les attestations certifiant qu’en 1969 l’appartement était destiné à l’habitation principale des locataires et le jugement ayant prononcé le divorce des locataires attribuant le domicile conjugal correspondant à l’adresse des lieux loués à l’épouse du preneur.
Elle en a donc déduit qu’au 1er janvier 1970, les locaux étaient à usage d’habitation et qu’en l’absence d’autorisation préalable, le bail commercial était nul et ce conformément à l’alinéa 5 de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation, la nullité du bail emportant de plein droit la nullité du congé.

Les appelants sollicitaient également la requalification du bail en bail d’habitation soumis à la loi du 1er septembre 1948 mais la Cour ne les a pas suivi sur ce point en décidant que l’ancienne épouse du locataire bénéficiait d’un bail verbal soumis au droit commun des baux d’habitation et mixte et que le prix du loyer est celui versé par le preneur et accepté par le bailleur.

En revanche, si les preneurs n’avaient pas souhaité se maintenir dans les locaux et s’ils avaient été obligés de les restituer, le bailleur engagerait sa responsabilité et pourrait être condamné à indemniser son locataire pour le préjudice subi (CA Paris, 11 mai 2001).

Source : Loyers et copropriété, 3/08, page 16