C.A.A. PARIS 2 Mai 2006

Le fractionnement d’une opération en plusieurs permis de construire obtenus le même jour par des bénéficiaires différents ne permet pas de faire l’économie d’un agrément « bureaux« .

Dès lors qu’une opération ou plusieurs opérations concomitantes ont pour effet de créer plus de mille mètres carrés de bureaux sur un même site, l’agrément prévu par l’article R. 510-1 du Code de l’urbanisme est exigible, y compris si ces opérations font l’objet de plusieurs permis de construire délivrés à des bénéficiaires différents.

Note de M. Patrick E. DURAND :

L’article R. 510-6 du Code de l’urbanisme prévoit un certain nombre d’exceptions au principe posé par l’article R. 510-1 et selon lequel, en Ile-de-France, les opérations « tendant à la construction, la reconstruction, la réhabilitation ou l’extension de tous locaux ou installations servant à des activités industrielles, commerciales, professionnelles, administratives, techniques, scientifiques ou d’enseignement » sont assujetties à une décision d’agrément préalable.

Cet agrément n’est pas requis, « lorsque ces opérations ajoutées à celles éventuellement réalisées sur le même site au cours des douze mois précédents portent sur une superficie hors œuvre nette inférieure à mille mètres carrés pour la construction de locaux destinés à un usage technique, scientifique, d’enseignement ou de bureaux » (C. urb., art. R. 510-6, 1, 4).

Il s’ensuit, a contrario, que la réalisation d’une opération portant sur un site vierge de tout locaux destiné à un usage technique, scientifique d’enseignement ou de bureaux mais ayant pour objet de créer de tels locaux pour une surface supérieure à mille mètres carrés doit être précédée d’un agrément, lequel doit être joint au dossier de demande de permis de construire lorsque, par ailleurs, cette opération relève du champ d’application de cette autorisation d’urbanisme (C. urb., art. R. 421-3).

Et il en va de même lorsqu’une opération succède à une précédente réalisée sur le même site, moins de douze mois auparavant, lorsque celle-ci a pour effet de porter la surface cumulée des locaux à plus de mille mètres carrés et ce, en ajoutant donc la superficie des locaux existants à celle des locaux à créer.

En pareil cas, l’agrément est donc exigé même si aucune des opérations considérées, prise isolément, n’a pour effet de créer à elle seule plus de mille mètres carrés de bureaux.

En l’espèce, deux permis de construire sur un même terrain avaient été délivrés, le même jour, à deux bénéficiaires différents sans qu’aucun n’autorise en lui-même la création de plus de mille mètres carrés de bureaux bien qu’en revanche, la surface cumulée des locaux à destination de bureaux ainsi autorisés atteignait 1.996 mètres carrés ; chacun des deux permis de construire autorisant des bureaux pour une surface opportunément limitée à 998 mètres carrés.

Mais dans la mesure où l’article R. 510-6, 1, 4 du Code de l’urbanisme ne vise expressément que les opérations « réalisées » dans les douze mois précédents sur le même site et non pas, plus généralement, les opérations « autorisées » dans ces mêmes conditions, il aurait donc pu être considéré qu’aucun des permis de construire n’était assujetti à agrément préalable.

Pour autant, la Cour Administrative d’Appel de Paris a jugé qu’un tel agrément était exigible et ce, aux motifs suivants :

« Considérant qu’il résulte des dispositions précitées qu’au cours d’une période de douze mois ne peuvent être autorisées sans agrément des opérations réalisées sur le même site portant sur une superficie hors œuvre nette supérieure à mille mètres carrés ; que les mêmes dispositions s’appliquent à des opérations concomitantes dont les superficies hors œuvre nettes doivent dès lors nécessairement s’ajouter ».

Il faut relever que la Cour ne s’est pas bornée à constater que les deux demandes de permis de construire portaient sur une même unité foncière, mais a également noté que les deux bâtiments projetés pour avoir fait l’objet de deux autorisations distinctes, délivrées à des bénéficiaires différents, présentaient néanmoins une interdépendance technique caractérisée par leur parc de stationnement.

Source : Constr.-urb., 6/06, page 26