Des murs profondément lézardés et l’affaissement généralisé de la toiture ne permettent pas de qualifier un bâtiment de construction existante pour l’application des dispositions de l’article NC2 du règlement du Plan d’Occupation des Sols (POS).
Note de M. Philippe BENOIT-CATTIN :
La frontière entre la construction existante et la ruine dépend de la matérialité des faits appréciée à partir de divers indices, tirés en général de l’état du gros œuvre et de la toiture.
Ont pu être considérés comme des constructions existantes et non comme des ruines : un corps de ferme très ancien et en mauvais état (CAA Lyon, 25 juin 1996), une construction dont la toiture et la charpente ont été entièrement détruites mais dont la maçonnerie n’a subi aucun effondrement, les murs porteurs ayant conservé leur aplomb et leur fonction d’appui (CAA Lyon, 14 avr. 1998), un bâtiment d’une grande vétusté, compte tenu de l’état des murs et de la toiture de son corps central (CAA Marseille, 22 févr. 2001), un bâtiment ayant conservé sa structure en état, ses pignons et une grande partie de sa toiture (CAA Marseille, 29 janv. 2004).
A l’inverse, n’ont pas été regardés comme des constructions existantes : une construction d’habitation ayant perdu sa charpente, l’un de ses pignons et l’une de ses façades (CE, 23 sept. 1988).
La décision de la Cour Administrative d’Appel de Nantes du 11 mai 2004 apporte d’intéressantes précisions sur le degré de délabrement que doit atteindre une construction pour cesser d’exister :
« Considérant que le bâtiment, objet de la demande de permis de construire présentée par M. et Mme Dupont, se situe dans la zone NC à vocation agricole du plan d’occupation des sols de la commune qu’il ressort des pièces du dossier que ce bâtiment, qui avait cessé d’être habité depuis de nombreuses années, fait partie d’un ensemble immobilier que les requérants ont acquis aux termes d’un acte du 28 juin 1996 indiquant qu’il s’agit d’un bâtiment « en mauvais état, anciennement à usage d’habitation » ; que les documents photographiques produits montrent une construction dont la toiture présente un affaissement généralisé et dont les murs sont profondément lézardés ; qu’ainsi, compte tenu de l’état de délabrement dans lequel il se trouvait, ce bâtiment ne pouvait être regardé comme constituant une construction existante à usage d’habitation au sens des dispositions précitées de l’article NC2 du règlement du POS ; que, par suite, c’est par une exacte appréciation de ces dispositions que le maire de Ruaudin a, par son arrêté du 22 avril 1999, refusé de délivrer à M. et Mme Dupont le permis sollicité ».
C’est en raison des graves désordres affectant les parties structurelles de la construction que celle-ci a pu, en dépit des apparences, ne pas être tenue pour une construction existante au sens des dispositions du POS.
La solution relève de l’appréciation souveraine du juge du fond (CE, 28 janv. 1998). Elle aurait pu être différente si le POS avait manifesté l’intention de ses auteurs de favoriser la conservation d’un patrimoine rural sans égard à l’état dans lequel se trouvent les constructions (V. par ex., CAA Lyon, 15 juin 1993). Tel n’était pas le cas en l’espèce, l’article NC2 du règlement du POS de la commune, applicable à la cause, disposant simplement que « … peuvent être autorisés : la restauration, la reconstruction et l’extension des constructions à usage d’habitation existantes…« .