Une Cour Administrative d’Appel annule un schéma directeur pour insuffisance de l’étude d’environnement ; cette jurisprudence devrait s’appliquer aux nouveaux Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) dont les obligations dans ce domaine ont été sensiblement renforcées à la fois par le droit interne et par le droit communautaire.
Note de M. Henri JACQUOT et Mme Lydie LALUQUE :
La Cour Administrative d’Appel de Lyon a annulé la délibération du Conseil de district approuvant le schéma directeur de l’agglomération annecienne en date du 31 mars 1995, pour insuffisance de l’analyse de l’état initial de l’environnement et absence de location de l’usine de traitement des ordures ménagères et des déchetteries existantes ou à créer dans les documents graphiques qui devaient faire apparaître « les éléments essentiels (…) d’élimination des déchets » (ancien art. R. 122-25 II).
La Cour relève notamment que « l’analyse de l’état initial du site que l’on trouve dans le rapport de présentation du schéma directeur de l’agglomération annecienne se borne à rappeler la notoriété reconnue du site d’Annecy et à produire dans une « liste des servitudes d’utilité publique » l’inventaire exhaustif des nombreux sites inscrits et classés qu’il renferme ; qu’il ne comporte aucun diagnostic sérieux de l’état du milieu naturel, notamment du lac d’Annecy dont la préservation des rives et des eaux constitue un enjeu majeur« . Transposant aux schémas directeurs (SD) la jurisprudence qui s’est développée à la suite de l’arrêt de section du Conseil d’Etat du 22 novembre 1985 « Daniau » sur les études d’environnement dans les POS, la Cour précise les conditions de validité de l’analyse de l’état initial du site qui était à réaliser lors de l’élaboration du SD de l’agglomération annecienne.
Le rappel de la notoriété du site d’Annecy ne pouvait pas en tenir lieu. Cette analyse devait être sérieuse, complète et concerner tous les éléments du milieu naturel, en particulier les plus sensibles comme ici le lac d’Annecy. La Cour sur ce dernier point applique le principe de proportionnalité qui consiste à proportionner le niveau d’exigence requis de l’étude d’environnement à la fragilité des mieux ou à l’intérêt des sites concernés.
Ce principe utilisé par la jurisprudence sur les études d’impact (CE 7 mars 1986, COGEMA) était expressément prévu à l’époque par les textes pour « l’analyse de l’état initial du site et de l’environnement » réalisée lors de l’élaboration des POS qui devait être effectuée « en fonction de la sensibilité du milieu » (ancien art. R. 123-17). Il était également strictement appliqué par le juge pour ces documents (CE 5 février 1997).
Par rapport aux Schémas Directeurs, les exigences ont été renforcées par les textes : nouvel article R. 122-2 du Code de l’urbanisme issu du décret du 27 mars 2001 pris pour l’application de la loi SRU et directive du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement. L’article R. 122-2 (2°, 5°) prévoit que l’étude d’environnement, dont le rapport de présentation du schéma doit rendre compte, devra comporter, comme celle des PLU (art. R. 123-2) et des cartes communales (art. R. 124-2), trois composantes : une analyse de l’état initial de l’environnement comme pour les schémas directeurs, mais également une évaluation des incidences prévisibles des orientations du schéma sur l’environnement, et l’exposé de la manière dont le schéma prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur.
En ce qui concerne l’état initial de l’environnement, l’étude doit décrire et analyser de façon objective les milieux naturels et urbains couverts par le schéma ; si l’on applique la jurisprudence de la cour administrative d’appel de Lyon dans l’arrêt commenté du 13 mai 2003, elle devra être d’autant plus approfondie qu’elle concernera des milieux fragiles. Il serait cependant normal que l’on n’exige pas le même degré de précision que pour celle des PLU qui couvrent des espaces moins étendus ; sinon à quoi servirait cette dernière lorsqu’un schéma aura été préalablement établi.
S’agissant de l’évaluation des effets sur l’environnement, alors que l’article R. 123-2 impose une évaluation des « incidences des orientations du plan » pour les PLU, l’article R. 122-2 exige seulement une évaluation des « incidences prévisibles des orientations du schéma », sans doute en raison de son caractère prospectif.
Enfin, alors que l’étude d’environnement qui accompagnait l’élaboration des Schémas Directeurs devait se contenter d’indiquer les mesures de préservation de l’environnement, les textes sont plus exigeants pour les SCOT : à l’instar de celles des PLU, elles doivent également exposer des mesures de mise en valeur.
Ce régime de l’étude d’environnement dans les SCOT, qui résulte du droit interne, est encadré par la directive du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement. Il faut s’assurer que le contenu de l’étude d’environnement prévue par l’article R. 122-2 pour les SCOT correspond bien à celui du « rapport sur les incidences environnementales » exigé par la directive dont le délai de transposition expire le 21 juillet 2004.
La comparaison des exigences des deux régimes d’évaluation environnementale fait apparaître quelques différences. Les règles résultant de la directive sont plus riches et font naître des obligations qui semblent plus étendues.