Sur la responsabilité du préfet dans le suivi de la remise en état des sites d’exploitation des installations classées.
Note de M. David DEHARBE :
Cet arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux illustre la possibilité d’obtenir du juge administratif la mise en cause de la responsabilité de l’Etat pour carence fautive dans l’exercice de la police des installations classées.
L’espèce s’inscrit dans cette tentative de déplacer la responsabilité du pollueur sur son contrôleur public.
Après un premier échec devant le Tribunal Administratif, une Société en Nom Collectif (SNC) reproche à l’Etat sa carence fautive dans la gestion de la remise en état du terrain d’assiette d’une installation de transformation d’amiante, terrain que la requérante aurait acquis à un prix excessif en 1995 pour le revendre finalement comme étant pollué en 2002.
La requérante considère que l’administration n’a pas contraint l’ancien propriétaire et exploitant du site industriel à le remettre en état dès la cessation de son activité.
De plus, la requérante considère que l’Etat ne l’a pas informée de la pollution des terrains en cause.
Cependant, la Cour Administrative d’Appel considère que l’éventuelle faute commise par l’Etat en tardant à imposer des mesures de remise en état n’est pas la cause déterminante du préjudice dont se prévaut la requérante.
En effet, la Cour rappelle que la SNC ne pouvait pas ignorer le passif de soixante-dix ans d’exploitation industrielle du site, ce d’autant que l’article 8-1 de la loi du 19 juillet 1976 (codifié à l’article L. 514-20 du Code de l’environnement) impose au vendeur d’informer l’acquéreur de ce qu’une installation classée a été exploitée et des « dangers et des inconvénients importants qui résultent de l’exploitation« .
Celui qui achète en toute connaissance de cause ne peut reprocher à l’administration d’être la cause déterminante de sa mauvaise affaire, quand bien même l’administration aurait tardé à imposer les mesures de remise en état qui s’imposaient.
Et le fait que le préfet dispose, en vertu de l’article L. 514-1 du Code de l’environnement, des pouvoirs de contrainte quant à l’obligation de remise en état, n’y change rien : l’acquéreur a donné un consentement en tout état de cause éclairé.