Le bail commercial renouvelé après délivrance d’un congé est un nouveau bail, le précédent cessant par l’effet du congé. Il en résulte qu’il ne constitue pas un contrat en cours dont l’administrateur du redressement judiciaire du preneur peut exiger l’exécution.
Note de M. Pierre-Michel LE CORRE :
L’article L. 145-9 du Code de commerce prévoit que les baux des locaux commerciaux ne cessent que par l’effet d’un congé donné au moins six mois à l’avance. Pour sa part, l’article L. 145-12 s’intéresse au renouvellement du bail. Son alinéa 3 évoque un « nouveau bail » qui « prend effet à compter de l’expiration du bail précédent, ou, le cas échéant, de sa reconduction (…)« . L’article L. 621-28 du Code de commerce, enfin, permet à l’administrateur judiciaire d’opter pour la continuation des contrats en cours.
Une délicate question de délimitation se pose lorsque, au jour du jugement d’ouverture, le contrat de bail est en cours, mais qu’un congé a été délivré pour un terme antérieur à la décision de l’organe compétent de continuer ou non le contrat. En pareil cas, le contrat est-il encore en cours ?
C’est à cette question que répond l’arrêt de l’Assemblée plénière du 7 mai 2004.
En l’espèce, le bailleur avait délivré congé le 30 juin 1993 pour le 31 décembre 1993, en proposant le renouvellement avec un loyer d’un montant supérieur. Le locataire est déclaré en redressement judiciaire le 22 décembre 1993.
Le 31 décembre 1993, le bailleur met en demeure l’administrateur judiciaire d’avoir à opter sur la continuation du contrat de bail. Le 11 février 1994, l’administrateur judiciaire répond qu’il entend poursuivre le bail, mais aux conditions initiales.
C’est dans ces conditions que le bailleur assigne le locataire et son administrateur judiciaire en résiliation du bail et en expulsion.
Les juges du fond vont faire droit à sa demande en relevant, d’une part, que le congé n’avait pas mis fin au contrat de bail initial et, d’autre part, que le défaut de réponse de l’administrateur judiciaire dans le délai d’un mois avait entraîné une présomption irréfragable de renonciation à la poursuite du contrat.
La Cour de cassation avait cassé cet arrêt. La Cour d’appel de renvoi (CA Chambéry 1er février 2002) avait entendu résister et s’était rangée à l’opinion de la première Cour d’appel. C’est dans ce contexte que l’Assemblée plénière devait être saisie.
Confirmant la solution proposée par la chambre commerciale, elle énonce que « le bail commercial renouvelé après délivrance d’un congé est un nouveau bail, le précédent cessant par l’effet du congé. Il en résulte qu’il ne constitue pas un contrat en cours dont l’administrateur du redressement judiciaire du preneur peut exiger l’exécution« . L’Assemblée plénière rend sa décision au triple visa des articles L. 145-9 et L. 145-12 du Code de commerce et de l’article 37 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction applicable aux faits de l’espèce.