1 – L’attention des praticiens a été attirée sur la simplification de la procédure d’avis des domaines réalisée par l’article 23 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite « Loi MURCEF ».
2 – Cette simplification, qui concerne essentiellement les acquisitions immobilières poursuivies par les collectivités locales, s’est traduite par la suppression de la délibération de passer outre et de la fiche de visa. Le texte, immédiatement applicable, est entré en vigueur selon les modalités habituelles d’entrée en vigueur de la loi. Le décret en Conseil d’Etat annoncé « en tant que de besoin » n’a pas encore été publié.
3 – De la lecture de cet article 23 de la loi n° 2001-168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réforme à caractère économique et financier, il ressort que, parmi les personnes morales visées par le nouveau texte, figurent notamment les concessionnaires des collectivités territoriales et les sociétés d’économie mixte.
A leur égard, le paragraphe III de l’article 23, relatif à la procédure, énonce :
« Les personnes mentionnées au I délibèrent au vu de l’avis du directeur des services fiscaux. Lorsque le consultant est un concessionnaire, la délibération est prise par l’organe délibérant du concédant ».
4 – Parce que les sociétés d’économie mixte ont très fréquemment la qualité de « concessionnaire », la question est fréquemment posée, depuis l’entrée en vigueur du texte, de savoir comment appliquer le paragraphe III de l’article 23 lors des acquisitions par les SEM « concessionnaires ».
5 – En effet, s’il est clair que le concessionnaire doit délibérer au vu de l’avis du directeur des services fiscaux, il apparaît également que « la délibération est prise par l’organe délibérant du concédant ».
6 – Quel sens et quelle portée pratique convient-il de donner à cette phrase ?
Même si l’on voulait s’attacher à la réalité des conventions publiques d’aménagement, surgissent d’autres obstacles liés à la qualité du concessionnaire et aux règles qui lui sont applicables ; l’exemple de la SEM est probant à cet égard.
A lire le texte, l’acquisition par une SEM bénéficiaire d’une convention publique d’aménagement, supposerait une délibération du concédant. En pratique, le concédant n’est autre que la commune, actionnaire majoritaire de la SEM. Cette remarque conduit à prendre alors en considération les textes relatifs aux SEM, modifiés en dernier lieu par la loi n° 2002-1 du 2 janvier 2002 et la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques.
D’une part, la loi du 2 janvier 2002 prévoit que la convention publique d’aménagement entre une SEM et une collectivité territoriale doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de dispositions (nouvel article L.1523-2 du CGCT issu de l’article 7 de la loi n° 2002-1 du 2 janvier 2002 tendant à moderniser le statut des sociétés d’économie mixte locales). Et la nouvelle rédaction de l’article L.1523-3 du CGCT fait disparaître la convention pour la réalisation d’acquisitions foncières (l’ancienne rédaction
ne prévoyait d’ailleurs aucune décision d’approbation ou de tutelle du concédant dans cette convention).
D’autre part, s’agissant d’une convention réglementée entre la société et un de ses actionnaires disposant d’une fraction de droits de vote supérieure à 5 %, la procédure des conventions réglementées, prévue par la loi du 24 juillet 1966 modifiée en dernier lieu par la loi NRE et codifiée dans le nouveau Code de commerce (art. L.225-38 et s.), doit être respectée. La convention autorisée préalablement par le conseil d’administration est approuvée par l’assemblée générale au vu d’un rapport spécial des commissaires aux comptes. A défaut d’autorisation préalable, et au pire, la convention peut être annulée si elle a eu des conséquences dommageables (financières ? ) pour la société.
Comment ajouter à ces textes qui encadrent la passation de la convention publique d’aménagement, une procédure de tutelle, de surcroît au profit d’un actionnaire majoritaire, sans égard pour le droit des sociétés ?
Ce texte ne peut avoir de sens que si on le comprend par rapport aux biens de retour dont certains concessionnaires sont amenés à financer l’acquisition et pour lequel il est nécessaire de titrer le concédant.
En effet, sous la qualification de « biens de retour », figurent des biens immobiliers confiés par le concédant au concessionnaire pour lui permettre d’assurer le fonctionnement de la concession, mais aussi les immeubles acquis par le concessionnaire en cours de concession pour l’exécution de la concession.
En dehors de cette hypothèse, le texte ne peut avoir de portée puisqu’il ne tient pas compte des règles propres à chaque concessionnaire (l’exemple des SEM est probant à cet égard) et qu’il ignore les règles du droit commercial.
Les travaux parlementaires ne permettent pas de deviner l’hypothèse à laquelle ont songé les rédacteurs de cet amendement. Aussi serait-il urgent que l’Administration précise l’interprétation de ce texte, ne serait-ce que pour fixer les opérateurs.
Pour notre part, nous considérons que ce texte ne peut avoir de sens que s’il est cantonné à l’acquisition des biens de retour financés par le concessionnaire et acquis pour le compte du concédant. Au-delà, son illégalité pourrait être soulevée.